80. Çàïèñêà îá Àðìÿíàõ íà ñåâåðíîì Êàâêàçå.

Les Armeniens depuis longtemps font le commerce en monopole dans une grande partie du pays situe entre les montagnes de Circassie, le Kouban et le Terek, chez les Kabardiens et pres d’Oust-Laba. Plusieurs d'entre eux se sont etablis dans des aouls sous la protection de quelques princes et fournissent par l'entremise de ceux-ci (en payant des droits considerables), aux besoins des peuples de l'interieur des montagnes, eloignes des forteresses turques. Pour mieux assurer leurs etablissements, ils se sont maries a des esclaves circassiennes et ont adopte leurs m?urs et leurs usages. Toujours en relation avec les Armeniens de Nakhitchevan qui sont leurs capitalistes, ils font un commerce tres avantageux pour eux, mais tres dangereux pour la sante publique de l'Empire Russe et tres nuisible a la surete de ses frontieres. Embrassant toute la frontiere de la ligne du Caucase proprement dite, il est bien difficile de les faire aboutir avec leurs marchandises aux points ou sont etablies les quarantaines. Afin d'epargner les frais d'un plus long transport et les precautions de la quarantaine, ils font passer leurs effets par les postes gardes par les cosaques. Ces marchandises sont justement les plus dangereuses pour la peste, comme les bourci et les pelleteries, et en effet elles ont ete la cause de la peste qui s'est souvent manifestee aux environs de Gheorghievsk.

Le plus grand mal que produit ce monopole, c'est qu'il met ces peuples dans l'independance, puisqu'ils n'ont plus besoin de recourir a nous et qu'ils obtiennent par les Armeniens tous les renseignements necessaires pour faire leurs mcursions. Ils trouvent d'ailleurs chez eux le debit du fruit de leurs rapines.

Mr. le General del Pozzo a ete victime de leur avidite. Il est generalement reconnu qu'eux ayant son argent ils ont indique aux Circassiens l'heure a laquelle il devait se rendre a sa campagae pour l'enlever comme ils ont fait, et afin de tirer une forte somme de lui pour sa rancon Sa constance a souffrir sa captivite a fait echouer leurs projets et il reussit enfin a se delivrer, bien convaincu de la trahison de 3 a ces scelerats. Son Ex. Mr. le Duc de Richelieu a trouve en 1811 dans un village ennemi l'Armenien Gegoro, qui etait chez lui le soir de la nuit ou il passa le Kouban d'Ekatherinodar avec les troupes. Les Circassiens attendaient le Duc au passage et savaient combien de troupes etaient restees sur les frontieres, et ils en profiterent en faisant une incursion terrible pendant que Son Ex. avec ses troupes se trouvait chez eux. Cet Armenien avoua qu'il avait ete envoye par les princes et declara ses comphces qui etaient deux autres Armeniens etablis a Bjedouh.

Peu s'en fallut que le Duc lui-meme n'eut le meme sort que le general del Pozzo. Apres un sejour de plusieurs jours a Ekatherinodar, il voulut partir pour Taman. Les Circassiens, instruits par les Armeniens de son passage, l'attendaient au nombre de 2,000 entre Stara-redoutka et Kalaous, mais un brave cosaque qui avait devance de quelques verstes Mr. le Duc, decouvrit ce complot et fut assez adroit pour s'echapper et avertir les cordons voisins qui envoyerent un detachement et deux pieces de canons a son secours, neanmoins Mr. le Duc fut attaque et plusieurs cosaques y perirent. [865]

Le jeune Prince Sefer-bey qui fut amene a Odessa, assura que c'etaient les Armeniens qui avaient prevenu Nassir-effendi (maintenant Ahmed-pacha d'Anapa) et Naurouz-Devlet-Mourza, qui ensuite lui-meme avoua que Nassir leur avait promis 100 mille piastres et l'exemption des droits de douane a Anapa pendant 20 annees. Car ils se promettaient, par la prise du Duc, de se faire rendre Anapa, Soudjouk-kale et toutes les terres occupees par les cosaques Zaporoges entre la mer d’Asow et le Kouban. Mille et mille autres preuves de leur perfidie peuvent facilement etre recueillies dans les chancelleries des cosaques de la Mer Noire et des gouverneurs militaires de Kherson.

Scassi a ete temoin oculaire de tout le mal dont ils sont la cause et cite un exemple arrive lorsqu'il se trouvait dans les montagnes, au mois de novembre 1812, chez les Bjedoug. Les Circassiens avaient enleve la veille d'un village de cosaques, situe entre Kara-Kouban et Ivanovskaya, une fille et deux cosaques; ils proposaient la fille a Scassi pour 400 piastres, ce qui faisait alors 320 roubles, (les deux cosaques avaient ete transportes dans l'interieur) Au moment de conclure le marche, un Armenien arrive, propose differentes etoffes et enleve le marche a Mr. de Scassi qui avait le projet de rendre la fille a ses parents par pure humanite. Mr. de Scassi se rend apres quelques jours a la quarantaine d’Ekatherinodar et raconte le fait a l’Ataman; l'Armenien s'y presente et offre ses services pour racheter la fille, mais ayant su qu'elle appartenait a une famille aisee, il fait sentir qu'on demandait cher; il revient quelques jours apres et demande pour dernier prix 3 m. roubles. On les lui promet, mais a son arrivee on lui reproche sa cupidite, et Scassi l’ayant confondu, il fut oblige de rendre la fille pours le prix qu'elle lui avait coute.

Les liaisons des Armeniens avec les Circassiens sont la source de tous les malheurs de notre frontiere et de la mesintelligence qui regne, car ils sont trop interesses a ce que les Circassiens.soient continuellement en guerre contre nous, pour pouvoir leur vendre aux prix les plus exorbitants les effets qui leur sont necessaires. Il n'y a pas de doute que si le gouvernement empechait ce monopole et reduisait leur commerce a ne pas depasser les frontieres, a l'egal des sujets russes, le besoin attirerait ces peuples chez nous, l'avantage du commerce en concurrence les familiariserait avec nos marchands; la confiance s'etablirait et produirait la tranquillite et la surete des frontieres

Son Ex. Mr. le Duc de Richelieu a defendu aux Armeniens le commerce dans l'interieur, du cote des cosaques de la Mer Noire, comme contraire aux privileges qui avaient ete accordes par Sa Majeste l'Imperatrice Catherine Seconde a ce peuple, et parce qu'ils donnaient les marches d'echange de leur frontiere a des entrepreneurs moyennant une somme qui se versait dans leur caisse Mr. le Duc l'aurait defendu sans cela a cause des abus qui en resultent.

Il n'est pas a la connaissance de Mr. de Scassi que Son Ex. Mr. le comte de Langeron ait jamais defendu ce commerce aux Armeniens au dela de la frontiere des cosaques Zaporoges. Il se rappelle seulement que l'Ataman des cosaques se plaignant de la grande quantite de marchandises que les Armeniens faisaient passer sous le nom du prince Kanouk-Sultan Mehmed-Ghirey, il lui fut ordonne de signifier au prince de ne pas abuser des facilites qu'on lui accordait et de defendre l'exportation et l'importation en grand de ces marchandises par les Armeniens a travers le Kouban habite par les cosaques.