486. Донесение к. с. Мазаровича ген. Ермолову, от 3-го мая 1822 года, № 39.

Quatre-cents prisonniers, deux canons et trois villages pilles sont le fruit des attaques faites recemment contre le pacha de Kars, par le frere du serdar d'Erivan. Des procedes indecents et des menaces suivies par des excuses furent les actes qui precederent le depart de Mr. Willock, charge d'affaires de Sa Majeste Britannique.

Y a-t-il guerre contre les Turcs? Persans et Anglais sont-ils brouilles ensemble? Voila deux questions naturellement a faire, Excellence, et auxquelles il est un peu difficile de repondre, car ici les choses ne se laissent pas definir au juste d'apres l'experience a laquelle se forment ailleurs les hommes de mon etat. Je me bornerai donc a vous transmettre simplement mes notes a ce sujet.

Le serdar d'Erivan et son frere se croient des droits sur Baiazed et Kars; Abbas-mirza voudrait se rendre maitre de Van pour le moms, le gouverneur de Kirmanschah, Mamed-Ali-mirza, fils du defunt prince [264] de ce nom, a herite des pretentions de son pere sur Bagdad. Les Turcs songent a peine a defendre leurs frontieres menacees ainsi de toute part. Plonges dans une profonde lethargie, ils semblent decides a risquer tout plutot que de montrer le besom qu'ils auraient d'en sortir.

D'un autre cote le Schah-in-Schah toujours flottant, Mr. le General, entre l'envie de s'enrichir par de nouvelles acquisitions et la crainte des depenses qu'elles entraineraient, ne veut pas marcher ouvertement contre l'ennemi ni mettre un frein aux passions de ses lieutenants, quelque dangereuses qu'elles soient. Ce nouveau Pygmalion ne s'occupe que d'accumuler des richesses et laisse faire pour ainsi dire tout ce que l'on veut, pourvu que les pechkeches grossissent ses tresors. Les uns et les autres cependant souhaitent avec beaucoup d'ardeur de voir l'issue des affaires avec la Russie, pour se decider a la guerre ou pour se prevaloir de la mediation que la Grande-Bretagne offre sans cesse a tous.

Temoin d'un conflit d'interets si opposes, je n'ai, Mr. le General, qu'a me feliciter du role paisible dont je suis charge, quoiqu'il soit bien difficile de ramener a la raison des gens bouffis par le succes. Quant a l'incident que pretexta Mr. Willock ou qui le forca d'aller a Londres, j'ai l'honneur de joindre ici trois notes dont la teneur vous fera connaitre les griefs d'Abbas-mirza contre ce personnage, tels qu'ils resultent de sa correspondance avec la capitale, et deviner les motifs qui determinerent le Roi de Perse a menacer sa tete, s'il persistait plus longtemps a refuser a Sa Majeste la somme reclamee.

C'est a Mirza-Saleh, Excellence, que le ministere de Tauris a envoye toutes les autres pieces justificatives a cet egard. Mr. Willock m'a persuade que la satisfaction obtenue a l'occasion de ses differends avec le Schah ne pouvait etre m plus prompte, ni plus flatteuse. L'on s'est dedit par ecrit du message choquant de Sa Majeste et le Sadr-Azam a donne au charge d'affaires une soiree ou se trouverent les premiers personnages de la cour a souper. “Je pars d'ici, me dit-il, fort content de tout le monde et personne a Teheran n'est fache contre moi" Je sais, Mr. le General, que l'Angleterre approuva la conduite de son agent pour n'avoir pas cede aux instances du Prince-heriditaire qui aurait voulu toucher un peu plus tot les cent mille tomans dont j'ai fait mention dans mes depeches de l'automne passe et qu'il n'aura point, je pense, tant qu'il conservera des sentiments hostiles contre la sublime Porte-Ottomane. Cormick et Hart, ennemis particuliers de Mr. Willock, s'associerent a son Altesse pour tacher de le perdre aux yeux de ses superieurs, et c'est pour se venger d'eux peut-etre qu'il a juge a propos de quitter la Perse.

Aboul-Hassan-khan, un des auteurs principaux des desagremens causes au charge d'affaires Britannique, dans l'intention de gagner la confiance du Naib-Sultan, s'etait donne beaucoup de mouvement pour suggerer au Roi que les Anglais doivent etre menaces serieusement si l'on veut retirer d'eux quelque avantage en Perse. De mon cote j'ai fait en sorte que mon collegue n'eut pas a endurer ici des torts nouveaux, en insinuant a tout le monde que l'honnetete et la politesse n'etaient jamais de trop dans quelque contestation que ce soit avec un personnage qui represente sa nation. Enfin il est parti et nous verrons, Excellence, au plus tard dans quatre a cinq mois, quelle sera la suite de son voyage.

Abbas-mirza sous peu de jours se transportera avec son quartier-general a Khoi. Le Kaimakam de retour depuis deux semaines a son poste, gardera comme de coutume l'intendance de la province. L'on a exerce presque tous les jours les soldats a lancer des bombes et les travaux a l'arsenal se suivent sans relache. Une personne de confiance m'a donne l'avis que son Altesse apres son depart recevra une deputation du haut clerge, qui le supphera de suspendre ses operations contre les Turcs. Ceux-ci alors seront invites d'envoyer a Khoi les plus distingues parmi leurs ecclesiastiques et l'on tachera de negocier une paix eternelle entre les deux empires. Les Persans, je crois, n'auront recours a cet expedient que dans l'mtention de gagner les pretres d'Erzeroum et de reussir ainsi a se rendre maitres de la ville sans coup ferir.

Le tzarewitch Alexandre attend ici une nouvelle destination dans quelque district eloigne de nos frontieres. Bassora est toujours bloquee par les Anglais et a Bender-Bouschir il y aura de rechef Mr. Bruce en qualite de consul. Des candelabres en cristal et autres objets pareils arrivent a Teheran, transportes par deux ou trois cents hommes; c'est un cadeau que le Roi d'Angleterre envoie au Schah.

Dans le Khorassan les troubles tiennent en haleine le Schah-zade, gouverneur de Mesched, au point qu'il a ete oblige dernierement de racheter au poids de l'or une centaine de personnes de sa cour surprises et transportees en esclavage

Un Anglais dont je n'ai pas encore pu savoir le nom, vient d'ecrire a Abbas-mirza une lettre datee de Londres dans laquelle il mande que les Russes et les Anglais memes sont ses plus grands ennemis, que son Altesse n'aurait rien de mieux a faire pour se garantir contre les embuches que ces deux puissances lui [265] tendent que de prendre Mr. le cosmopolite (auteur de la lettre) a son service, le creer premier ministre et suivre ses conseils de preference a tout autre. H ignore certainement qu'il faut etre eunuque, quand on aspire a ce haut degre de confiance en Perse.