288. Тоже, от 14-го января 1817 года. — Эривань.

Pour le coup je suis tres content. Le Serdar est arrive ici hier au soir et m'a fait prier de rester aujourd'hui ici comme j'ai eu l'honneur deja de l'ecrire a V. Ex. Ce matin a onze heures il m'a fait appeler chez lui, et je m'y suis rendu sur le champ. Apres les ceremonies d'usage il a commence a me parler d'affaires; je me suis fait un devoir de consigner notre conversation dans mon journal, ainsi que son portrait. Cette piece, d'apres ce que je crois, vous servira mieux a Teheran que si je vous l'envoyais au hasard. Croyez, mon General, que je tache de vous servir autant que mes forces et mon entendement me permettent de le faire. En attendant je vous assure que non seulement les chretiennes et les chretiens sont pour nous, mais aussi les Tartares. Voici les paroles qu'ils disent a qui veut et a qui ne veut pas les entendre "Pourvu que ces imbeciles ne nous ,,commandent pas, nous serions tres-contents meme si "les Russes eussent a coucher avec nos femmes". On n'attend que le signal de la guerre pour faire des v?ux ardents pour la prosperite de vos armes. Le Serdar m'a donne la nouvelle que vous avez avec vous 24 officiers d'Etat-major pour faire la carte de la Georgie. Je lui ni repondu qu'un seul homme de cette classe aurait suffi pour ce but, si tel avait ete celui de V. Ex. Mais comme je devais entendre la nouvelle dans un autre seps, j'ai cru bon d'amener la conversation au point de lui assurer que V. Ex. n'aura avec elle que des officiers de la garde Imperiale et des civils. Je suis assure que le Serdar me suppose commissionne pour traiter a Teheran les affaires dont V. Ex. est commissionne seulement. Il a dit que vous m'avez envoye, mon General, expres en avant, afin que je tache d'incliner le gouvernement de votre cote et d'apres vos desirs, que sans cette condescendance preliminaire de la part des Persans vous ne viendrez pas ici pour sur. Us croient la guerre imminente par notre volonte exclusive, et ils se tiennent prets en cas que vos propositions tendraient a leur ravir d'autres provinces, mais jamais pour celles que nous possedons. Il y a six jours passerent par ici pour la capitale deux Francais, arrives de Constantinople dans l'espoir d'obtenir du service. L'un est W. Ubert, et l'autre W. Mercher, tous les deux ex-officiers de Napoleon, l'un pour la cavalerie et l'autre pour l'infanterie. Ils se sont beaucoup informes quand vous arriverez ici. Le Serdar a paru tres-satisfait de nous. Il m'a envoye en cadeau des pommes, des poires et des confitures et il n'a pas voulu que je prisse d'autres chevaux pour suivre ma route, que ceux de son ecurie. Je sais qu'il a tenu des discours sur mon compte qui ne laissent pas de flatter un bon serviteur de Sa Majeste Impenale et le zele diplomate de votre choix. Si vous avez besoin d'etre au courant des choses qui se passent ici, V. Ex. pourrait gagner un certain Hadji-Aboul-Hassan, qui est un fier coquin, tres-fin, insinuant et capable de tout; au moins il en a Pair. Cet homme a ete plusieurs fois envoye traiter des affaires aupres de Nicolai Feodorovitch. Le general Achverdoff et Paul Ivanitch doivent le connaitre. A present il ne me reste pas autre chose a dire a V. Ex. que la nouvelle qu'on m'a donnee de Constantinople, c'est que le baron Strogonoff n'a pas encore fait sa visite chez le Sultan quoiqu'il ait efe plusieurs fois invite de se presenter a la Porte. Il a repondu toujours qu'il se regardait encore comme simple voyageur ou hote. Mon General, ne trouveriez-vous pas Bon, apres tout ce que j'ai eu l'honneur de vous exposer, de me donner la permission de traiter quelque point concernant votre mission en Perse, afin de mieux penetrer les principes pohtiques que ces messieurs sont en cas de professer a notre egard? A quoi bon vous exposer ici sans la certitude de finir d'une maniere honorable votre commission? Certains hommes doivent jouir de l'opinion qu'ils n'ont qu'a se presenter pour finir les affaires a leur facon; mais ces hommes doivent, ainsi que Jesus, avoir Jean qui les precede. N'allez pas croire, je vous en supplie, que ce langage est la consequence d'une [144] ambition mal placee. Dieu m'en garde, et plutot que d'etre ainsi soupconne par V. Ex., je me condamne a un silence meme eternel. Je n'ai que le seul desir de lui temoigner mon zele, et l'envie de la bien servir. C'est a vous a present de decider, mon General, comme il vous plait le mieux. Quant a moi, je ne saurais mieux faire que de me placer sous vos auspices et, fidele dans l'observation de vos ordres, etre pret toujours a les executer comme il vous paraitra bon et convenable de me les donner. Demain de bon matm je me mettrai en route pour Tauris, ou il faudra absolument passer quelques jours. Je compte y etre samedi en huit. La presente vous sera expediee par l'employe qui est aupres du Patriarche d'Etchmiadzin, lequel m'a donne l'information qu'il y a une occasion tres-sure. Ma petite et bonne comitive me charge de presenter a V. Ex. ses tres-humbles respects. Je vous piie, mon General, de me compter toujours au nombre de vos bons serviteurs.

P. S. Encore une fois mille pardons pour ma plume. En ce qui regarde le style, je me repose entierement sur la bonte de votre c?ur et sur votre indulgence. A M. M. les generaux Sokoloff, Koutousoff et Wehaminoff mille bonnes choses de la part du pauvre cavaher. Que les voyages a cheval sont penibles! Le pauvre Simon est en compote.